
Le Magazine de Polytechnique Montréal
Une passion écrite dans le ciel
La relève en lumière
L’étudiant au baccalauréat en génie aérospatial Gabriel Dubé s’est envolé en août dernier pour une mission arctique à l’île Devon, au Nunavut, dans le cadre du Haughton-Mars Project (HMP) de la NASA, afin de mener des expériences pour de futures explorations sur la Lune et sur Mars. Il devient ainsi le premier étudiant de Polytechnique à participer à ce projet de renommée internationale. Rencontre avec un passionné de spatial!

Gabriel Dubois. Photo : HMP-2022/Rod Pyle
« D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu travailler en aérospatiale », sourit Gabriel Dubé dès la première question qu’on lui pose en entrevue. D’entrée de jeu, l’étudiant répond de manière « terre à terre », ce qui détonne avec les étoiles qui brillent dans ses yeux aussitôt qu’on évoque le domaine spatial.
Cette passion qui l’habite a décidé de son orientation jusqu’à maintenant. Le regard tourné vers le ciel, le jeune homme se consacre dans un premier temps à l’aviation et rejoint les cadets de l’Air du Canada dès 13 ans, jusqu’à son entrée au baccalauréat, décrochant au passage sa licence de pilotage motorisé et de planeur. Mais le jeune homme est bien décidé à aller encore plus haut.
Alors finissant au cégep, Gabriel Dubé hésite entre étudier en génie ou en physique. C’est l’occasion d’intégrer la société technique en fuséonautique Oronos qui le convainc définitivement de rejoindre Polytechnique en 2018. « Avoir la possibilité de participer à la construction de fusées, tout en étudiant dans le domaine qui me passionne, a été décisif pour moi », souffle-t-il. Dès sa première année, il devient membre d’Oronos, plus particulièrement au département de propulsion. « Nous faisons partie des rares équipes internationales à construire notre propre moteur hybride », souligne-t-il avec fierté. Il y deviendra directeur du département propulsion en 2020, puis directeur général. « Nous sommes toutes et tous unis par une même passion et un même objectif, c’est une expérience unique. »
Se tailler une place dans le spatial
Au cours de son baccalauréat, il effectue tout d’abord un stage chez Bombardier, puis rejoindra MDA, où il a alors l’occasion de travailler sur des satellites et les procédés d’assemblage. « J’ai aussi pu voir des pièces et des boîtes électroniques qui seront installées dans la future Station spatiale internationale! »
Fort de ses premières expériences, Gabriel Dubé soumet sa candidature pour prendre part au Haughton Mars Project (HMP), dirigé par Pascal Lee, scientifique planétaire au SETI Institute et au centre Ames de la NASA en Californie. Cette expédition de recherche arctique, soutenue notamment par la NASA, le SETI Institute et le Mars Institute, consiste à mener des expériences d’exploration future sur la Lune et sur Mars et offre des opportunités annuelles de recherche sur le terrain à des étudiantes et des étudiants d’exception sélectionnés aux États-Unis, au Canada, et de par le monde.
La candidature de Gabriel Dubé est retenue et il devient récipiendaire de la bourse Apollo HMP-2022, la bourse d’études du projet HMP la plus sélective et la plus prestigieuse accordée aux étudiants et aux récents diplômés.
« C’était dans ma to-do list d’aller dans les régions polaires une fois dans ma vie! J’étais impressionné par l’occasion qui s’est présentée à moi. Pascal Lee a une carrière remarquable, c’était d’autant plus gratifiant qu’il m’invite aux côtés d’autres scientifiques de haut niveau à prendre part à cette aventure.»
Direction Mars depuis la Terre
La mission, qui consiste à réaliser une expédition de recherche arctique sur la base polaire de la NASA HMP située à l’île Devon au Nunavut, dont l’environnement extrême, l'isolement et l'éloignement offrent aux scientifiques et au personnel des occasions de recherche uniques.
Nous rencontrons l’étudiant la veille de son départ pour le Nunavut, il est concentré sur la préparation de ses affaires pour la mission : « Ces trois semaines de mission vont me permettre de confirmer que je suis capable de me retrouver en région éloignée. Lorsque j’étais cadet de l’Air, nous faisions des expéditions de survie en forêt, c’est une bonne occasion de tester mes compétences », s’amuse-t-il.
Afin de prendre part à la mission HMP, l’étudiant devait amasser 20 000 dollars pour soutenir adéquatement sa participation, tant pour les frais de voyage que pour l’équipement scientifique, les fournitures et leur transport, ou encore les coûts logistiques sur le terrain en Arctique. Une ronde de financement qu’il a réussi à boucler grâce à Pooneh Maghoul, professeure agrégée au Département des génies civil, géologique et des mines, et spécialiste en géotechnique, qui lui a offert son appui.
Retour sur un mois d’aventure
Les missions de Gabriel Dubé sur le terrain consistaient à s’immerger dans ce milieu d’expédition polaire, de sciences planétaires, et de technologie spatiale au HMP pour mener principalement deux expériences.
D’une part, il a procédé à l’étude d’aérostats captifs, en particulier des ballons à gaz remplis d'hélium équipés de charges utiles d'imagerie, attachés à des plates-formes fixes ou mobiles, y compris des véhicules astromobiles à commande humaine. D’autre part, il a étudié l’utilisation de drones, particulièrement de drones d'imagerie, d'interfaces de drones à vue à la première personne et de contrôleurs de mouvements à une main de type joystick.
« Pendant ces trois semaines, j’ai fait plusieurs vols de drone pour déterminer comment les futurs astronautes utiliseront cet outil pour explorer la surface d’astres comme Mars et la Lune. Nous avons aussi lancé plusieurs ballons captifs, les attachant à nos VTT lors de traversées de l’île. J’ai pu mettre en application mes connaissances acquises à Polytechnique, surtout en ce qui a trait à la résolution de problèmes. Par exemple, j’ai construit une perche avec les matériaux disponibles à la base pour éviter que les ballons sur nos VTT frappent le sol. »
De retour d’expédition, Gabriel Dubé a un enthousiasme palpable. « Cette immersion dans l’Arctique était inoubliable. Les paysages rappellent véritablement Mars sur Terre! J’ai appris beaucoup sur la géologie et l’histoire de l’île Devon. Partout où l’on marchait, des fossiles d’algues, de coraux et d’autres espèces marines sortaient du sol. J’ai aussi appris des notions d’astrophysique grâce aux chercheurs du MIT qui nous ont fait plusieurs présentations sur leurs sujets de recherche. »
À n’en pas douter, les étoiles dans les yeux du finissant au baccalauréat ne sont pas près de s’éteindre.