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Inventer la 6G (2e partie)

L’équipe du Pr Skorobogatiy a conçu par impression additive un multiplexeur à ondes THz qui pourrait servir de modèle pour les futures technologies 6G. (Photo : Maksim Skorobogatiy)
Pendant que la cinquième génération des standards pour la téléphonie mobile (5G) se déploie dans nos villes, des ingénieurs travaillent sur la technologie qui lui succèdera, la « 6G ». Pr Maksim Skorobogatiy fait partie du lot. Avec son équipe, il vient de dévoiler dans un article paru dans Nature Communications comment l’impression additive pourrait permettre de fabriquer certaines des composantes qui jongleront avec des ondes des bandes de fréquences térahertz.
Chaque nouvelle génération de téléphonie mobile vient avec sa nouvelle gamme de fréquences, toujours plus élevée que la précédente. Au tournant de 1990, les antennes devaient capter des ondes avoisinant les 900 mégahertz (MHz). Aujourd’hui avec la 5G, elles ciblent des fréquences allant de 10 à 50 gigahertz (GHz), soit 10 000 à 50 000 MHz, dans la région du spectre électromagnétique correspondant aux ondes courtes.
Et ça n’a pas fini de grimper.
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Dans son laboratoire de Polytechnique Montréal, Maksim Skorobogatiy, professeur titulaire au Département de génie physique, développe une partie de la prochaine génération de composantes qui rendront possible la 6G. Des composantes qui doivent jongler avec des fréquences de 100 GHz à 10 térahertz (THz), soit de 100 000 à 10 000 000 MHz.
Un beau défi selon celui qui est aussi titulaire de la Chaire de recherche du Canada en photonique térahertz omniprésente. « C’est la nouvelle frontière pour les communications sans-fil », affirme-t-il. « Il y a encore beaucoup de travail à réaliser pour émettre ces ondes, mais aussi les détecter et les moduler avec des données. »
Pourquoi s’attaquer à des fréquences de cet ordre de grandeur? Tout simplement parce qu’elles permettront de pousser beaucoup plus de données, et ce, plus rapidement. Le débit pourrait atteindre 1 téraoctet par seconde, soit assez pour transmettre l’équivalent de 1 000 films du service en ligne Netflix en une seconde. Dis comme ça, l’avancée paraît futile. Mais si on pense à des applications comme la chirurgie à distance et le transport autonome, elle prend tout son sens.
Avant d’en arriver là, il faudra toutefois développer une nouvelle gamme d’outils adaptés aux ondes de fréquence THz. L’équipe de Polytechnique Montréal s’y affaire justement.
VERS LA 6G
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Dans un article publié récemment dans Nature Communications, Maksim Skorobogatiy et son équipe ont dévoilé une approche simple et peu coûteuse pour fabriquer une partie des composantes qui seront au cœur des futures technologies 6G en présentant comme preuve de concept le cas d’un multiplexeur/démultiplexeur.
Le multiplexeur/démultiplexeur est un dispositif qui capte plusieurs signaux à la fois, puis les réunit afin de transmettre toute l’information dans un seul canal. Un exemple? Les signaux audio et vidéo d’un film. En jumelant les signaux, on augmente la quantité de données transmises sur un réseau. Le dispositif fonctionne également dans le sens inverse pour diviser plusieurs signaux mixtes en des flux de données individuels.
Le dispositif de l’équipe de Polytechnique mise sur la fabrication additive pour concevoir en plastique le cœur du multiplexeur. Une fine couche d’argent est ensuite déposée sur les sections qui transmettent les ondes de façon à en faire des guides d’ondes dites « plasmoniques ».
« Normalement, on utilise des procédés de lithographie et de gravure sur gaufrettes de silicium pour fabriquer ce genre de dispositif, ce qui requiert des installations qui coûtent extrêmement cher », explique le professeur Skorobogatiy. « Avec notre approche, on propose une façon peu coûteuse de fabriquer les dispositifs qui serviront à la 6G. »
vers des assemblages... en trois dimensions |
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Le recours à l’impression additive pour fabriquer des dispositifs comme des multiplexeurs à ondes THz ouvre la voie à de nouvelles architectures, notamment à des conceptions en trois dimensions plutôt que simplement en deux dimensions. L’équipe du professeur Skorobogatiy s’aventure d’ailleurs dans cette direction. « De cette façon, on pourrait fabriquer des systèmes plus compacts ayant quelques millimètres de côté plutôt que des centimètres », affirme ce dernier. Comme les ondes THz avoisinent 1 millimètre d’amplitude, il est difficile d’imaginer des composantes qui seront plus petites, selon lui. « La seule solution technique, c’est de stocker les choses de façon verticale en 3D. », ajoute-t-il. |
En savoir plus
Fiche d'expertise du professeur Maksim Skorobogatiy
Site web du Département de génie physique
Article Add drop multiplexers for terahertz communications using two-wire waveguide-based plasmonic circuits paru dans Nature Communications
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