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Le FeCralloy : un vieil alliage rempli de promesses

14 juillet 2020 - Source : NOUVELLES

C’est un alliage résistant à des températures allant jusqu’à 1 050 degrés Celsius qui pourrait accélérer le développement de technologies de fabrication de diesel à partir de méthane. Les applications potentielles du « FeCralloy », un alliage de fer, de chrome et d’aluminium, sont multiples. Le professeur Gregory Patience et la professeure Daria Camilla Boffito, du Département de génie chimique à Polytechnique Montréal, le révèlent d’ailleurs dans une revue de littérature qu’ils ont publiée récemment dans le journal Chemical Reviews de l’American Chemical Society, l’un des dix journaux scientifiques les prestigieux au monde, avec un facteur d’impact de 52,7.

Gregory Patience, professeur titulaire au Département de génie chimique; Daria Camilla Boffito, professeure agrégée au Département de génie chimique.

Gregory Patience, professeur titulaire au Département de génie chimique; Daria Camilla Boffito, professeure agrégée au Département de génie chimique.


Bon nombre de procédés industriels requièrent des matériaux à la fois chimiquement stables et résistants aux hautes températures pour servir de support aux catalyseurs afin d’accélérer la vitesse avec laquelle ils opèrent des réactions chimiques.

Ce sont eux, par exemple, qui permettent de fabriquer du cyanure d'hydrogène (HCN) ou de l’acide nitrique (HNO3). D’autres servent plutôt à traiter les gaz d’échappement des voitures à essence pour les transformer en molécules moins toxiques.

Le FeCralloy, un alliage qui combine fer, chrome et aluminium, se distingue d’autres matériaux parce qu’il permet d’effectuer des catalyses à de très hautes températures et, par conséquent, de compléter des réactions chimiques plus rapidement.

Cette grande efficacité du FeCralloy lui vient entre autres de sa capacité à diffuser la chaleur uniformément. Selon Gregory Patience, professeur titulaire au Département de génie chimique, cette caractéristique permet d’imaginer des procédés intensifiés, et donc de concevoir des réacteurs plus petits et moins coûteux. « C’est un matériau qui a des propriétés tout simplement spectaculaires », résume-t-il.

L’alliage réussit son tour de force en formant une couche d’oxyde d’aluminium à sa surface lorsqu’on chauffe le matériau au-delà de 700 degrés. Celle-ci empêche aussi la corrosion du fer et du chrome, en plus de bloquer leur carbonisation, permettant des réactions chimiques à des températures dépassant les 1 000 degrés Celsius.

Ce n’est pourtant pas d’hier que l'on connait ce matériau. Il a été découvert au fond d’un four en 1931 par un ingénieur suédois œuvrant pour une entreprise de métallurgie. « Ça a pris des années avant que l'on comprenne que cet alliage pourrait être utilisé pour améliorer nos procédés », explique le professeur Patience.

Transformer le méthane

Par ses propriétés physicochimiques, le FeCralloy permet maintenant de rêver à des solutions de chimie verte. Gregory Patience et son équipe y travaillent d’ailleurs et ont pour objectif de réduire l’empreinte environnementale des entreprises pétrolières en réutilisant le méthane qui s’échappe des sites d’exploitation.

« Lorsqu’on extrait du pétrole, il y a aussi un relâchement de méthane et de produits volatiles qui vont directement dans l’air ou qui sont brûlés sur-le-champ », explique le chercheur, qui est aussi titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la catalyse hétérogène à haute température et haute pression. « Ce méthane torché pourrait plutôt être transformé en carburant de type diesel. »

En collaboration avec sa collègue du Département de génie chimique à Polytechnique, la professeure agrégée Daria Camilla Boffito, Gregory Patience développe présentement une technologie de microraffinerie capable de produire du carburant à partir de ce gaz qui, autrement, ne sert à rien.

« La prochaine étape, c’est d’apporter notre prototype en Alberta pour l’installer chez un producteur », indique le chercheur. Une opération qui devrait être réalisée d’ici six mois, selon lui.

Prototype de technologie de microraffinerie qui comprend du FeCralloy

Le professeur Gregory Patience et son équipe travaillent présentement sur une technologie de microraffinerie qui comprend du FeCralloy.


En savoir plus

Revue de littérature « FeCrAl as a Catalyst Support » publiée dans Chemical Reviews (en anglais, abonnement requis)
Fiche d’expertise du professeur Gregory Patience
Fiche d’expertise de la professeure Daria Camilla Boffito
Site du Département de génie chimique

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