
Le Magazine de Polytechnique Montréal
Wáhta Semiconductors
Entrepreneuriat
Ils souhaitent intégrer les caméras et les capteurs infrarouges multifonctionnels aux technologies omniprésentes telles que les cellulaires et les voitures intelligentes. Mais en attendant, Anis Attiaoui et Salim Abdi, cofondateurs de Wáhta Semiconductors, accumulent les prix en entrepreneuriat. Après avoir obtenu cet été le 2e prix du jury au concours génie en affaires 2020, ils ont raflé la 3e place du concours technopreneur.

Les fondateurs de Wáhta Semiconductors, Anis Attiaoui et Salim Abdi
Avantage concurrentiel
Au cœur de leur projet se trouve un matériau susceptible de faire dégringoler les prix des technologies infrarouges : un semi-conducteur à base de germanium et d’étain (GeSn). En raison de la compatibilité de ce matériau avec le silicium, la jeune pousse estime être en mesure de fabriquer des capteurs et des caméras infrarouges à une fraction du prix de ce qui se fait présentement.
« Fabriquer un capteur infrarouge de haute sensibilité coûte au moins 10 000 $ », explique Anis Attiaoui, doctorant en génie physique à Polytechnique Montréal. « Avec notre matériau qui est directement intégré sur le silicium, il en coûterait seulement 100 dollars, donc 100 fois moins. »
Anis Attiaoui caractérise les propriétés optiques du matériau depuis bientôt trois ans sous la supervision d’Oussama Moutanabbir, professeur au Département de génie physique et cofondateur de Wáhta. Il a également perfectionné les techniques de sa dispersion sur des gaufrettes de silicium.
« On a soumis un premier brevet l’an passé, puis on a réalisé qu’on pourrait en faire une utilisation spécifique en photodétection, raconte le jeune étudiant. C’est à ce moment qu’on s’est dit qu’on pourrait démarrer une ‘‘startup’’ et voir jusqu’où on pourrait amener notre produit. Notre groupe a soumis deux autres brevets cet été et deux autres déclarations d’invention sont en préparation. »
De la découverte à la commercialisation
Maintenant que les caractéristiques de l’alliage et les techniques pour le fabriquer sont maîtrisées, le groupe cherche à fabriquer un photodétecteur basé sur son matériau et capable de détecter des longueurs d’onde dans le proche infrarouge, aux environs de 1,5 μm. Salim Abdi, cofondateur de Wáhta et étudiant à la maîtrise en génie physique, se penchera sur ce problème, épaulé par l’équipe de Wáhta qui comprend aussi Simone Assali, associé de recherche.
Anis Attiaoui croit que de telles technologies pourraient se révéler utiles dans plusieurs domaines, et même faire leur place dans la communication optique intégrée et dans les villes intelligentes. « On pourrait, par exemple, les utiliser pour détecter les substances toxiques ou inspecter les produits agricoles, explique-t-il. Des caméras infrarouges pourraient aussi assister les systèmes de navigation des voitures autonomes pour les aider à mieux naviguer lorsqu’il y a du brouillard ou une tempête. »
L’équipe de Wáhta compte aussi développer des photodétecteurs ciblant des longueurs d’onde plus élevées, dans l’infrarouge moyen, au-delà de 2 μm.
Pareil outil pourrait notamment servir à l’imagerie thermique et à la détection des gaz neurotoxiques. « On ajuste la fonctionnalité selon ce que l’on veut détecter en faisant varier la quantité d’étain qu’on injecte dans le germanium », explique le doctorant.
Celui-ci est toutefois conscient des défis qui se présenteront à son équipe. « Il a fallu 10 à 15 ans pour développer les caméras infrarouges qui sont présentement utilisées, dit-il. Nous, on y travaille depuis à peine trois ans, et on s’attend à ce que ça prenne un certain temps avant d’atteindre le même niveau de performance. »