
Le Magazine de Polytechnique Montréal
Un laboratoire nomade de créativité

La créativité, cela s’apprend ? « Plus exactement, cela se développe, à la manière d’un muscle, avec de l’entraînement continu », affirme Sylvie Gendreau, qui donne un atelier nomade sur la créativité destiné aux étudiants au doctorat. Cet atelier, intitulé La créativité à votre portée et développé sous la responsabilité du Pr Jamal Chaouki, fait partie des quatre crédits de formation complémentaire obligatoire pour tous les doctorants de Polytechnique.
Une formation pas ordinaire, que Sylvie Gendreau donne en marchant – clin d’oeil à Socrate. « La marche est bénéfique à la stimulation du cerveau. De plus, extraire les étudiants de leur environnement habituel aide à les faire sortir de leurs schémas de pensée habituels. »
Sur les chemins de la créativité
Conçu comme un jeu grandeur nature, l’atelier propose un périple à travers la ville jusqu’à la destination, inconnue des étudiants jusqu’à la fin du parcours. « Nous cheminons tout en abordant des thèmes reliés aux processus de découverte scientifique, à l’histoire des grandes idées, mais aussi à la culture, à la psychologie et à la sociologie », indique Sylvie Gendreau, qui précise qu’il ne s’agit pas d’une promenade touristique. Le chemin est parsemé d’épreuves ludiques destinées à mettre les étudiants en condition d’ouverture et de dialogue et à cheminer dans leurs réflexions.
La destination est généralement un établissement partenaire, tel que le Centre des sciences de Montréal, le Jardin botanique, le Centre Phi, le Planétarium, l’ÉcoFab ou le Musée des beaux-arts. Dans ce lieu, les étudiants devront valider les idées qu’ils ont développées en chemin.
Intelligence collective et cocréation
« Je souhaite amener les étudiants à voir les choses auxquelles ils n’ont pas l’habitude de faire attention. La ville offre un excellent soutien à cette démarche, car elle regorge de réalisations techniques et artistiques. » L’exposition à l’art est un élément important du processus créatif, croit Mme Gendreau. « Être doctorant en génie n’est pas incompatible avec la sensibilité artistique. La science et l’art sont complémentaires et s’appuient tous deux sur une démarche de réflexion et de création. L’ingénieur est le meilleur ami de l’artiste. Il permet à ce dernier de concrétiser ses rêves grâce à ses connaissances technologiques et à sa maîtrise des processus. »
L’atelier se veut un laboratoire vivant, où les participants font l’expérience du processus de l’innovation, de l’idéation à la cocréation, en faisant appel à l’intelligence collective. Ils sont amenés à échanger leurs idées, à les confronter aux pratiques observées sur le terrain et à intégrer dans leurs différentes itérations les commentaires des usagers ciblés. Un blogue développé par Mme Gendreau, cahiersdelimaginaire.com, permet aux participants de poursuivre en ligne les échanges d’idées.
Au début, les étudiants sont assez déconcertés par l’approche de l’atelier, voire réticents. « Certains se plaignent d’avoir à marcher, d’autres craignent de perdre leur temps, ne voyant pas la finalité de l’exercice. Mais, au cours de l’atelier, la majorité des participants découvrent beaucoup sur eux-mêmes et sur la force de l’intelligence collective. Ils apprennent aussi à admettre que, malgré leur savoir, ils ne détiennent pas toutes les réponses. Comme ils sont très brillants, les échanges avec eux sont très riches », constate Sylvie Gendreau, qui apprécie l’ouverture de Polytechnique à cette approche originale.
« En encourageant les jeunes chercheurs à prendre le temps de rêver, d’observer et d’explorer, de même qu’à donner et à recevoir du feedback sur des idées, on leur donne les moyens de développer leur intelligence créative, la ressource la plus sûre pour résoudre les problèmes économiques, sociaux ou environnementaux de la planète », conclut-elle.