
Le Magazine de Polytechnique Montréal
Transition énergétique : passons à la vitesse supérieure

Normand Mousseau, directeur scientifique de l'Institut de l'énergie Trottier (IET). (Photo : Émilie Ferguson)
« L'impératif de transition énergétique demande une transformation rapide et approfondie de l'intégralité de notre système énergétique, de la production à l’utilisation de l’énergie. Il faut réaliser cette transformation de manière coordonnée et à grande échelle », rappelle le Pr Normand Mousseau. Professeur titulaire au Département de physique et chercheur à l'Institut Courtois, à l’Université de Montréal, ainsi que professeur associé au Département de génie physique de Polytechnique, celui-ci est également directeur scientifique de l'Institut de l'énergie Trottier (IET), codirecteur scientifique du Carrefour de modélisation énergétique et conseiller principal – trajectoires de transition à l'Accélérateur de transition.
L’IET, dont les activités sont pérennisées jusqu’à au moins 2030 grâce à un renouvellement du soutien de la Fondation familiale Trottier, vise à la levée des obstacles freinant le déploiement de la transition énergétique. Il encourage à cet effet la relève dans le domaine énergétique et appuie la génération de connaissances et l’innovation dans ce même domaine.
Barrières structurelles
S’il se démarque par sa production d’électricité décarbonée, le Québec, comme le Canada d’ailleurs, pèche par un manque de réelle vision stratégique. « Des objectifs de carboneutralité ont été fixés, cependant, la trajectoire n’est pas clairement définie », constate le Pr Mousseau. En l’absence d’une stratégie énergétique adaptée aux besoins présents et futurs de la société, l’efficacité des diverses initiatives de transition mises en œuvre demeure mitigée, malgré des investissements parfois conséquents.
L’IET accompagne les gouvernements dans l’atteinte de leurs objectifs climatiques en les aidant à prendre des décisions éclairées. « Au Québec, les secteurs institutionnel, industriel et commercial sont à eux trois responsables de 72 % des émissions de gaz à effet de serre (les GES) », rapporte Normand Mousseau. Les mesures touchant ces secteurs peuvent donc exercer une influence majeure sur les émissions de GES, qu’on pense à celles qui ont trait à l'aménagement du territoire, aux politiques de transport ou aux projets d’amélioration de l'efficacité énergétique dans le secteur de la construction, par exemple.
Collaborations institutionnelles
La contribution de l’IET à l'essor d'une stratégie de transition globale s’appuie sur de la modélisation technico-économique permettant de mettre en lumière les différents enjeux, ainsi que les technologies qui démontrent leur efficacité.
Les premières analyses réalisées par l’IET ont révélé que le Canada manque de ressources pour mener une réflexion approfondie sur les enjeux. Par la suite, l’IET a participé à la création de l’Institut climatique du Canada. Il a également piloté avec l’Université de Victoria et l’Université de Calgary la création du Carrefour de modélisation énergétique, dont le mandat est de fournir des modèles énergétiques aux décideurs publics et de fédérer la communauté de la modélisation énergétique au pays. L’IET coopère aussi avec l’Accélérateur de transition pour identifier les barrières et les trajectoires menant à l’objectif de carboneutralité.
Des outils pour les décideurs
Actuellement, l’équipe de l’IET pilote un projet financé par Environnement Canada et consacré à la biomasse énergétique. Elle développe notamment une grille d’évaluation de l’utilisation de la biomasse dans un contexte de carboneutralité.
L’Institut vient aussi de lancer l’Explorateur de trajectoire, développé avec l’appui de Ressources naturelles Canada. Ce remarquable outil de visualisation permet de tester certaines hypothèses en comparant l’impact de diverses approches sur l’atteinte d’un objectif de carboneutralité. « Tout l’aspect visualisation a été pris en charge par Kashika Studio, entreprise créée par le Pr Thomas Hurtut, du Département de génie informatique et de génie logiciel », précise le Pr Mousseau.
Par ailleurs, l’IET produit des rapports influents. Perspectives énergétiques canadiennes, par exemple, est considérée comme une étude de référence sur la décarbonation. Le rapport sur les lacunes dans la réglementation sur l’utilisation des halocarbures a, quant à lui, contribué à la modification de cette réglementation, ce qui devrait permettre de réduire de milliers de tonnes par an les émissions de GES au Québec.
Liberté de penser et d’agir
« Gouvernements, villes, entreprises et citoyens expriment tous le désir d'agir, affirme Normand Mousseau. Le soutien de la Fondation familiale Trottier aide l’IET à éclairer la voie à ces acteurs afin qu’ils puissent s’impliquer de la façon la plus efficace et coordonnée dans la transition. Il nous offre la liberté de réfléchir et d’aller rapidement à l'essentiel. »
En bref
- Le directeur scientifique de l'Institut de l'énergie Trottier (IET), le Pr Normand Mousseau, souligne l'urgence d'une transition énergétique au Québec, mais note le manque de vision stratégique malgré des objectifs de carboneutralité.
- L'Institut de l'énergie Trottier (IET) collabore avec les pouvoirs publics pour aider à lever les obstacles à la transition énergétique. Utilisant la modélisation, l'IET développe notamment des outils permettant de mesurer l'impact des approches sur la carboneutralité. Ses rapports influents, tels que Perspectives énergétiques canadiennes, ont déjà contribué à des modifications réglementaires.
- Grâce au soutien de la Fondation familiale Trottier, l'IET peut guider efficacement les gouvernements, les villes, les entreprises et les citoyens dans la transition énergétique.