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Nos scientifiques aux côtés des citoyens pour capturer des microplastiques

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Par Catherine Florès
27 février 2023 - Source : Magazine Poly  | VersionPDFdisponible (Hiver 2023)
27 février 2023 - Source : Magazine Poly
VersionPDFdisponible (Hiver 2023)
Professeure Dominique Claveau-Mallet
La Pre Dominique Claveau-Mallet, experte en traitement des eaux au Département des génies civil, géologique et des mines (photo : Denis Bernier)


Polytechnique s’engage auprès des citoyens pour coproduire des connaissances utiles à la résolution des enjeux de la société. L’étude qu’elle a menée récemment sur l’utilité du filtrage des eaux rejetées par les laveuses illustre l’efficience de cette science citoyenne.

Une pollution quasi invisible, mais redoutable

Chaque fois que nous faisons une brassée de lavage, les vêtements contenant des matières synthétiques déposés dans la laveuse vont générer des milliers de particules de matières plastiques qui iront polluer les cours d’eau, et auront des effets négatifs sur les écosystèmes et in fine, sur la santé humaine. Non seulement d’autres polluants présents dans l’environnement peuvent venir se fixer à ces particules, mais celles-ci, en étant ingérées par divers organismes vivants, finissent par se retrouver tout au long de la chaîne alimentaire.

Préoccupation citoyenne

Les eaux du Saint-Laurent sont particulièrement menacées par ce phénomène, le fleuve étant l’un des cours d’eau dont la concentration en microplastiques est la plus élevée au monde. L’installation d’un système de filtration des eaux usées sur les laveuses serait-elle une solution efficace pour piéger les microplastiques contenus dans les tissus? 

Le Groupe de recommandations et d’actions pour un meilleur environnement (GRAME) a entrepris de recruter des citoyens montréalais préoccupés par leur impact environnemental, afin de les faire participer à une étude visant à répondre à cette question. Cette étude, d’une durée de six mois, demandait aux participants d’installer un filtre sur leur laveuse, de récupérer la charpie accumulée dans le filtre après les lavages, de documenter chaque lavage en indiquant le cycle utilisé et la nature des articles lavés, et enfin, de faire parvenir les échantillons et la documentation à l’équipe responsable du volet scientifique de l’étude. Une trentaine de citoyens ont répondu présent.

Intervention de chercheurs de Polytechnique

La Pre Dominique Claveau-Mallet, experte en traitement des eaux au Département des génies civil, géologique et des mines et le Pr Abdellah Ajji, spécialiste des matières plastiques au Département de génie chimique, ont accepté avec enthousiasme de prendre en charge ce volet scientifique, qui consistait à caractériser et à analyser la composition des échantillons prélevés, et à émettre les directives relatives à la collecte des échantillons.

« Il s’agissait d’un modèle intéressant de science citoyenne, où le contact avec les citoyens s’est fait efficacement grâce au GRAME. De plus, l’étude nous a fourni une grande quantité de données et pour moins cher que si elle avait été réalisée avec des données expérimentales provenant de nos laboratoires », témoigne la Pre Claveau-Mallet.

« Cela nous a permis de travailler en prise directe sur la vie réelle des citoyens en utilisant des données issues tout droit de leur foyer. On a ainsi pu discerner les situations qui peuvent limiter l’utilisation de filtres. C’est un avantage, car la mise en oeuvre d’une solution d’ingénierie dépend au final de son adoption par les usagers », poursuit-elle.

Dévoilés le 8 février dernier, les résultats indiquent que jusqu’à 13 tonnes de microplastiques pourraient être détournées du réseau des eaux usées de Montréal, grâce aux filtres sur les laveuses. « Cependant, ce ne serait pas réaliste de penser que cet objectif pourrait être réalisé par la seule bonne volonté des citoyens, car l’installation d’un filtre n’est pas toujours aisée et tous les filtres ne se valent pas », met en garde Dominique Claveau-Mallet.

« Amener les fabricants de laveuses à équiper leurs produits d’un système de filtration serait sans doute beaucoup plus efficace. En s’associant à la science, une mobilisation citoyenne aura de meilleures chances de convaincre les décideurs d’agir en ce sens », croit la chercheuse.
 

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