Carrefour de l'actualité

Décarboner l’acier pour assurer un avenir durable

Évoluer

Par Meryl Gilgenkrantz
3 mars 2023 - Source : Magazine Poly  | VersionPDFdisponible (Hiver 2023)
3 mars 2023 - Source : Magazine Poly
VersionPDFdisponible (Hiver 2023)
Sophie Roy, doctorante en génie chimique

Photo : Caroline Perron

 

Sophia Roy, candidate au doctorat en génie chimique et huitième lauréate de l’Ordre de la rose blanche, s’est lancée dans un défi de taille : celui de décarboner l’industrie de l’acier. Animée par son engagement à pouvoir agir contre la crise climatique, elle a élaboré un projet d’études ouvrant la voie à des solutions concrètes qui permettront d’aider les producteurs d’acier à repenser leurs manières de faire.

Un projet à fort impact environnemental

« Durant mon baccalauréat, nous envisagions les questions environnementales à la fin du projet d’ingénierie. Or, si nous voulons nous inscrire dans une démarche durable, il faut y penser dès l’étape de la conception », souligne Sophia Roy. Ce premier constat dessine les prémisses de son projet doctoral à Polytechnique Montréal : dans une perspective de développement durable, il faut considérer l’analyse du cycle de vie d’un procédé dans son ensemble.

Ses réflexions l’amènent à concentrer son projet de recherche sur la production de l’acier, alors que cette industrie est encore responsable à elle seule de près de 10 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales provenant de l’utilisation de combustibles fossiles. Au Canada, elle représente 14,4 millions de tonnes de CO2, dont 1,8 million au Québec. Pourtant, l’acier est un matériau que l’on retrouve dans l’ensemble des secteurs industriels et qui s’avère critique pour la transition énergétique, puisqu’il sert entre autres à la fabrication d’éoliennes, de véhicules électriques et de nouveaux chemins de fer.

Un deuxième constat s’impose à Sophia Roy : au sein de la chaîne de production, les trois quarts des émissions de CO2 peuvent être attribués à une seule étape cruciale, soit la réduction du minerai de fer. Pour en diminuer l’empreinte carbone, la voie envisagée est de remplacer le gaz naturel par de l’hydrogène obtenu par électrolyse de l’eau, une solution qui s’avère une grande consommatrice d’électricité. La candidate au doctorat propose alors de réévaluer la trajectoire de décarbonation visant un transfert direct à l’hydrogène. En combinant l’analyse de cycle de vie à la conception d’un nouveau procédé de réduction du minerai de fer, le projet ambitionne de repousser la frontière des connaissances sur les nouvelles technologies et stratégies de production de l’acier. Son projet intitulé « Vers un acier neutre en carbone : repenser la production de l’acier dans une perspective de cycle de vie », d’une durée de trois ans, s’appuiera sur les savoirs du professeur titulaire Louis Fradette, expert dans le captage de carbone, et du professeur agrégé Jean-Philippe Harvey, spécialiste en technologie des matériaux, du Département de génie chimique.

Collaborer avec le milieu industriel

Ce projet permet à l’étudiante de découvrir une nouvelle réalité : celle des industriels. Sophia Roy y voit l’occasion de contribuer à changer les mentalités en apportant des solutions concrètes. « Travailler de concert avec un partenaire industriel permet de mieux cerner ses besoins avec la fierté de savoir que mon projet d’études sera appliqué, souligne-t-elle. Au Québec, nous sommes capables d’être des leaders en développement durable. Néanmoins, face à l’urgence climatique, il n’y a pas une solution magique. Il s’agit de penser de manière systémique à une panoplie de solutions qui permettront d’atténuer les émissions de CO2. »

Des projections prometteuses

Les premiers tests d’injection d’hydrogène effectués à même l’unité industrielle avaient le potentiel de diminuer de près de 10 % les émissions de l’étape de réduction, soit près de 80 000 tonnes de CO2 évitées sur une année. Ce projet vise aussi la conception d’une nouvelle génération du procédé de réduction du minerai de fer, selon des critères d’efficacité énergétique et d’impacts environnementaux et sociaux. Le déploiement d’un tel procédé vise à décarboner la production d’acier de manière substantielle et à réaliser une avancée concrète vers un acier vert québécois, à l’avant-garde de l’innovation internationale. 

Sa vision à long terme se veut optimiste, alors que Sophia Roy s’ouvre encore à de nouvelles façons de voir le monde qui l’entoure. « Il y a des dimensions sociales, économiques, politiques entre autres à prendre en compte lorsqu’il s’agit de trouver des solutions d’avenir. Tout le monde a un rôle à jouer et peut apporter sa contribution. C’est dans un effort commun que nous arriverons à mettre en œuvre des solutions durables qui inspireront les générations futures », conclut-elle.
 

À lire aussi

5 décembre 2022
NOUVELLES

Sophia Roy, huitième récipiendaire de l'ordre de la rose blanche