
Le Magazine de Polytechnique Montréal
Collaborer à la formation de talents pour rebâtir Haïti
L’Institut des Sciences, des Technologies et des Études Avancées d’Haïti (ISTEAH) et Polytechnique Montréal, avec le soutien d’IVADO, unissent leurs forces dans un partenariat inspirant.
Au service du développement
L'ISTEAH, créé il y a 12 ans, s'est imposé comme le plus grand établissement d'études avancées à formation hybride en Haïti. Sa mission : former des scientifiques et des innovateurs de haut niveau capables de contribuer au développement du pays. L'institut a tissé, pour cela, des liens étroits avec plusieurs universités dans le monde, dont Polytechnique Montréal.
Des stages de recherche de plusieurs mois sont notamment proposés à des étudiants de l’ISTEAH. Ils sont soutenus par des bourses du Programme des futurs leaders dans les Amériques, piloté par Affaires mondiales Canada, ainsi que par des bourses d'IVADO. À Polytechnique, trois départements accueillent ces stagiaires : mathématiques et génie industriel, génie informatique et génie logiciel, ainsi que génies civil, géologique et des mines.

Le professeur Samuel Pierre
« La collaboration est excellente. Les stagiaires trouvent à Polytechnique un environnement propice au développement de leurs compétences scientifiques et techniques, notamment en IA », constate Samuel Pierre, professeur titulaire au Département de génie informatique et génie logiciel de Polytechnique Montréal, cofondateur et président de l’ISTEAH.
Celui-ci souligne que réserver les stages aux étudiants des cycles supérieurs permet d’éviter une « fuite des cerveaux ». « Ce sont des adultes autonomes, qui ont déjà commencé à bâtir leur vie en Haïti et souhaitent y retourner, enrichis de leur expérience et des connaissances acquises sur le campus. »
Des racines et des ailes
Jud Pierre fait partie de ces étudiants qui ont vu leur carrière transformée par cette expérience de stage. Après avoir obtenu un DESS et une maîtrise en génie des ressources hydriques à l'ISTEAH en 2017, il a décroché une bourse pour effectuer un stage en aménagements hydroélectriques à Polytechnique, sous la direction du Pr Musandji Fuamba. « Dès le processus d'admission, je me suis senti bien encadré et guidé », témoigne-t-il.
Encouragé par ses mentors, les professeurs Fuamba et Pierre, il est revenu à Polytechnique à l'automne 2021 pour entreprendre un doctorat. Lui-même s’est grandement impliqué dans l’accueil des étudiants internationaux à Polytechnique.

Jud Pierre, doctorant en génie civil
Myrtha Bonatoute poursuit une maîtrise en administration des affaires à l’ISTEAH. Elle réalise actuellement un stage au LARIM – le laboratoire dirigé par le professeur Samuel Pierre – sur la conception d’une base de données scolaire.
« Mes études à l’ISTEAH m’ont permis d’adopter une approche interdisciplinaire, en combinant administration et technologie pour relever les défis des établissements scolaires et universitaires, et améliorer l’expérience utilisateur », explique-t-elle.
Au LARIM, elle s’initie à l’utilisation d’outils performants pour la création et la gestion de bases de données, dans un environnement qu’elle juge particulièrement formateur. « Cette expérience me permet d’acquérir des compétences que je pourrai appliquer concrètement dès mon retour en Haïti, à l’ISTEAH où je souhaite développer ma carrière. »
Elle observe une similitude entre les méthodes d’enseignement à Polytechnique et à l’ISTEAH : « Ce qui me confirme que l’ISTEAH offre l’une des meilleures formations en Haïti. »

Myrtha Bonatoute, stagiaire au LARIM
Jean-Kénel Dessources étudie, quant à lui, le génie informatique à l’ISTEAH depuis quatre ans et amorce sa transition vers le doctorat. Grâce à un stage d’IVADO, il mène des recherches à Polytechnique Montréal sur les grands modèles de langage (LLM), en se concentrant sur l’évaluation et la génération de code, sous la direction du professeur Foutse Khomh.
« À Polytechnique, j’ai vu concrètement comment l’IA peut améliorer le quotidien. Ça m’a donné envie de m’investir encore plus », raconte-t-il. Ce stage lui permet d'acquérir des compétences et de contribuer à des projets concrets, avec en tête l’idée de les adapter un jour au contexte haïtien.
M. Dessources aime aussi transmettre. « J’ai déjà formé des jeunes en programmation. Les voir progresser et entrer à l’université, c’est très motivant », dit-il. Une passion qui rejoint pleinement l’approche de l’ISTEAH : former des formateurs pour élargir l’impact sur le terrain.

Jean-Kénel Dessources, étudiant à l'ISTEAH, stagiaire IVADO
Une professeure invitée
La professeure Rose Michelle Smith, spécialiste en chimie de l'environnement à l'ISTEAH et titulaire de la Chaire UNESCO Femmes et sciences pour le développement, est également présente à Polytechnique en tant que chercheuse invitée.
Sa chaire de recherche a pour objectif principal d'accroître le nombre de femmes dans les filières scientifiques, notamment en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques (STIM). Cette chaire mène des actions depuis la petite enfance jusqu'au niveau universitaire. À travers des conférences mensuelles dans les écoles, l'organisation d'olympiades nationales de sciences au niveau secondaire et un soutien actif aux candidatures d'étudiantes aux programmes de bourses internationales, elle contribue à rendre plus inclusif le développement scientifique haïtien.
À Polytechnique, la Pre Smith collabore avec le Pr Musandji Fuamba à un projet d'évaluation de la disponibilité et de la qualité de l'eau à Cap-Haïtien (Haïti), à Montréal et en Normandie (France). « Haïti ne manque pas d'eau, c'est sur le plan de la gestion de ses ressources hydriques que se trouvent les grands enjeux », déclare-t-elle.

Rose Michelle Smith, professeure en chimie de l'environnement à l'ISTEAH, titulaire de la Chaire UNESCO Femmes et sciences pour le développement, chercheuse invitée à Polytechnique
Un enrichissement mutuel
« Accueillir des étudiants et des professeurs d'Haïti a un impact aussi sur le milieu de Polytechnique. C'est un échange, un partage de visions du monde, qui aide à une compréhension réciproque et empêche le repli sur soi si nuisible à la richesse humaine », constate le Pr Pierre.