
Le Magazine de Polytechnique Montréal
Boomerang fait tourner plus rond la filière alimentaire
Au Canada, au moins 30 % de la production alimentaire finit à la poubelle. Boomerang s’attaque de front à ce gaspillage en transformant les résidus bio-alimentaires en ressources à haute valeur ajoutée. Fondée par des étudiants de HEC Montréal et de Polytechnique Montréal, cette jeune coopérative montréalaise qui a participé au parcours trajet-m de Propolys, l’incubateur d’entreprises de Polytechnique, incarne pleinement les principes de l'économie circulaire et change le regard sur les filières de l’alimentation.
De l’idée à la coopérative : une germination rapide

Mathieu Gauthier et Tangui Conrad, deux des cofondateurs de Boomerang (© La Halte)
L'aventure commence en 2019 avec Mathieu Gauthier et Tangui Conrad, deux étudiants de HEC intéressés par l’économie circulaire. Un cours en entrepreneuriat leur demande d’identifier une problématique dans leur environnement et de présenter une solution innovante.
« Nous nous sommes intéressés au secteur des microbrasseries en milieu urbain, en plein essor à cette époque. Vous connaissez l’attrait de la bière sur les étudiants… Le timing était parfait : les brasseurs croulaient sous les résidus du brassage, la drêche, et ne trouvaient pas de solution adéquate de valorisation. Nous avons eu l’idée de recycler cette matière en un ingrédient alimentaire », rapporte Mathieu.
Pendant la Marche pour le climat cette même année, Mathieu et Tangui retrouvent fortuitement Basile Thisse, étudiant à la maîtrise en génie industriel à Polytechnique Montréal, avec qui ils avaient sympathisé précédemment lors d’une soirée étudiante. Ils échangent avec lui sur leur idée et il leur parle du Coopérathon, la plateforme de création d’entrepreneuriat d’impact social de Desjardins. Le soir même, Mathieu et Tangui s'inscrivent, proposant à Basile de se joindre à l'aventure. Le quatrième mousquetaire, Alexis Galand, fraîchement diplômé d’un baccalauréat en génie mécanique de Polytechnique et commençant sa maîtrise à HEC, complète bientôt cette équipe aux compétences complémentaires.
« Nous avons choisi de créer une coopérative plutôt qu'une entreprise classique, car ce modèle répond mieux à notre vision d’un développement économique durable et solidaire », explique Mathieu.
Le projet de l’équipe se distingue au Coopérathon et remporte des bourses qui lui permettent d’investir dans des équipements.
Boomerang lance d’abord une farine alimentaire issue de la drêche, prouvant le potentiel insoupçonné de ce résidu brassicole. Les jeunes entrepreneurs développent un prototype de procédé qui démontre la faisabilité de leur projet. Mais comment récupérer la drêche des brasseries, comment trouver des clients? En 2020, l’équipe de Boomerang participe à un parcours d’entrepreneuriat technologique de Propolys qui l’aide à surmonter ces défis. « L'accompagnement de Propolys nous a aidés à structurer un service de collecte urbaine des résidus et à cibler nos marchés potentiels », déclare Mathieu.
Un savoir-faire qui s’étend
Des quatre fondateurs aujourd’hui titulaires d’une maîtrise, seuls Tangui Conrad et Mathieu Gauthier sont restés à temps plein dans la coopérative. Le premier comme coordonnateur général, le second comme responsable du développement des affaires. Alexis Galand a conservé son siège au conseil d'administration, tandis que Basile Thisse a regagné sa Belgique natale pour se lancer dans un nouveau projet d’entreprise en démarrage.
Avec, aujourd’hui, cinq employés et une phase d'expansion tout juste terminée, Boomerang est installée au Marché central de Montréal, carrefour stratégique de la distribution alimentaire de la métropole. Désormais, la coopérative intercepte également des fruits et légumes excédentaires pour les transformer par des procédés de déshydratation. Ces ingrédients déshydratés sont ensuite revendus à des distributeurs et transformateurs alimentaires. Le succès est au rendez-vous : lors de son dernier exercice, Boomerang a récupéré près de 140 tonnes de résidus alimentaires, les sauvant ainsi de l’enfouissement.
En se positionnant comme un véritable facilitateur d’économie circulaire, la coopérative prouve qu’avec de l’ingéniosité et une vision durable, les déchets peuvent devenir des ressources précieuses.

(© La Halte)