
Le Magazine de Polytechnique Montréal
Nanoparticules précieuses et IA au service du diagnostic du cancer
Certains se lancent dans l’entrepreneuriat pour devenir leur propre patron ou par goût du défi. Cécile Darviot, elle, l’a fait par attachement à son projet de recherche.
En commençant son doctorat en génie physique sous la direction du Pr Michel Meunier, réputé pour ses réalisations dans les domaines des nanotechnologies et de la plasmonique, l’étudiante était loin de s’imaginer en future entrepreneure. Elle n’avait alors pour but que de consacrer ses efforts à sa thèse portant sur le développement d’une technique de diagnostic cytopathologique direct en microscopie.
Cette technique, basée sur un procédé breveté par l’équipe du Pr Meunier, utilise des nanoparticules d’or ou d’alliage or-argent comme biomarqueurs.

Cécile Darviot, étudiante au doctorat en génie physique et cofondatrice de Vega BioImagering.
Distinguer des cellules de cancer avec précision
« Nous modifions ces nanoparticules en les associant à des anticorps spécifiques, afin qu’elles ciblent les cellules porteuses des antigènes à identifier sur des échantillons de tissus biologiques. Afin de détecter plusieurs protéines dans le même échantillon, nous utilisons différentes couleurs de nanoparticules. Nous employons un système optique associé à une IA pour interpréter rapidement et précisément les images obtenues. Initialement, ma thèse ne portait que sur l'utilisation de l'imagerie hyperspectrale pour analyser des échantillons après l'injection de nanoparticules, mais, très vite, je me suis intéressée à tous les aspects du projet afin de mieux contrôler le processus », détaille Mme Darviot.
Le potentiel de ce projet a été confirmé par les collaborations de l’équipe du Pr Meunier avec le milieu clinique, en particulier avec la Dre Dominique Trudel, pathologiste et chercheuse au CHUM. Celle-ci a entrevu l’intérêt du procédé pour diagnostiquer des cancers.

Création de Vega BioImaging
« Encouragés par l’intérêt des médecins, nous tenions à faire franchir au projet la distance entre l’innovation scientifique et l’application clinique réelle. La création d’une entreprise nous est apparue comme le moyen de concrétiser cette ambition. Moi, je n’avais jamais songé à l’entrepreneuriat, mais quand le Pr Meunier m’a proposé de m’associer avec lui et Sergiy Patskovsky, associé de recherche à son laboratoire, et de m’occuper de la mise sur pied de l’entreprise, j’ai saisi cette opportunité extraordinaire de donner à ma recherche une finalité très tangible », poursuit Cécile Darviot, qui a suivi à cet effet le parcours du Centech en marge de son doctorat pour s’initier aux arcanes de la création d’entreprise.
L’initiative des chercheurs a donné naissance à la jeune pousse Vega BioImaging, qui vise à offrir une solution novatrice, abordable et efficace, pour améliorer la prédiction d’efficacité des traitements ciblés en oncologie. « Pour le moment, nous concentrons notre solution sur la problématique du cancer du sein, indique Mme Darviot, présidente-directrice générale de l’entreprise. Il existe des traitements qui améliorent la survie de femmes atteintes d'un cancer du sein surexprimant un certain gène. Mais actuellement, la méthode pour déterminer si une patiente peut bénéficier de ce traitement manque de précision, en particulier dans les cas limites. Notre méthode de détection peut réduire le taux d’erreur, et ainsi augmenter les chances de succès des traitements. »
Plusieurs entreprises, dont Photon ETC et Object Research Systems, collaborent au développement de cette technologie qui, en plus d'améliorer l'efficacité des analyses, promet des économies significatives pour le système de santé.
Le vent en poupe

Michel Meunier, professeur titulaire au Déprtement de génie physique.
« La détermination de Cécile impressionne. Non seulement elle a exploré différentes disciplines, comme la biologie, la chimie, la nanotechnologie et l’imagerie durant son doctorat, mais elle s’est engagée sur le chemin ardu de l’entrepreneuriat technologique pour concrétiser notre innovation en une application significative pour le traitement du cancer », déclare le Pr Meunier.
Celui-ci a vu son projet de recherche collaborative mené avec Vega BioImaging et le CHUM recevoir en mars dernier une subvention totale de plus de 500 000 $ octroyée dans le cadre du programme SynergiQc du CQDM. Ce coup de pouce permettra à l’équipe de mener une étude clinique de grande envergure sur une banque de tissus provenant de patientes. Avec cette preuve de concept, la jeune pousse pourrait se positionner comme une entreprise émergente à fort potentiel dans le domaine des tests diagnostiques.