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Par Catherine Florès
2 mars 2023 - Source : Magazine Poly  | VersionPDFdisponible (Hiver 2023)
2 mars 2023 - Source : Magazine Poly
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Professeur Sarath Chandar, titulaire d’une chaire CIFAR en intelligence artificielle

Photo : Caroline Perron

 

« Lorsque j’observe mon fils âgé de deux ans, je me dis que l’IA n’est pas près de pouvoir remplacer l’humain. Nous avons des capacités à nous connecter immédiatement avec notre environnement et à apprendre en permanence qui dépassent de loin celles d’une machine. Ce que l’IA nous promet, ce sont de très bons outils d’assistance pour nous libérer de certaines tâches, nous permettant ainsi de focaliser notre propre intelligence sur des processus créatifs », estime Sarath Chandar, professeur au Département de génie informatique et génie logiciel et titulaire d’une chaire CIFAR en intelligence artificielle (IA).

De l’Inde au Canada

Celui-ci se passionne pour les technologies de l’intelligence artificielle depuis qu’il a découvert le domaine du traitement du langage naturel, à l’occasion d’un stage de troisième année durant son baccalauréat. Après ses études de maîtrise à l’Indian Institute of Technology Madras, ce natif de l’Inde est allé passer un an au sein du laboratoire d’IBM Research, avant de venir au Québec effectuer son doctorat auprès de Yoshua Bengio et Hugo Larochelle à l’Université de Montréal. Il a été recruté par Polytechnique dès la fin de ses études, en 2020.

Machines en apprentissage continu

« J’ai mis sur pied mon laboratoire et je suis devenu père la même année en plein milieu de la pandémie, de quoi devenir expert en gestion du temps! », révèle le chercheur, qui se consacre à des travaux fondamentaux sur l’apprentissage automatique, l’apprentissage profond, l’apprentissage par renforcement, au traitement du langage naturel ainsi qu’à un domaine récent de l’IA : des systèmes d’apprentissage continu.

« À la différence des modèles d’apprentissage statiques, les systèmes d’apprentissage continu sont capables de s’adapter à des nouvelles situations en assimilant de nouvelles données, sans nécessiter une reprogrammation. Un peu comme un humain, ils améliorent progressivement leurs capacités à réaliser leurs tâches. »

Mener des recherches de pointe en apprentissage automatique à Montréal, une des capitales mondiales de l’IA, est très excitant. « Les résultats de nos travaux ont le potentiel de transformer plusieurs secteurs! », confie le Pr Chandar, dont l’équipe explore, par exemple, des solutions d’IA pour accélérer le développement de nouveaux médicaments.

Vers une IA plus transparente

Pendant longtemps, la performance des algorithmes a été privilégiée – d’où leur complexité croissante – au détriment de leur interprétabilité, c’est-à-dire la compréhension de leurs critères de décision. « Maintenant que l’utilisation des systèmes d’apprentissage se répand à tous les secteurs critiques, comme la médecine, les ressources humaines, la justice, la finance, etc., les décisions prises par ces systèmes doivent pouvoir se justifier », souligne le Pr Chandar.

Ces enjeux éthiques et moraux guident les travaux de son équipe, qui se penche notamment sur les biais touchant au genre dans le traitement du langage naturel, ou sur la question de l’interprétabilité, c’est-à-dire les critères utilisés par un système lorsque celui-ci prend une décision.

Enseigner, une vocation première

S’il s’épanouit dans son domaine de recherche, Sarath Chandar se sent enseignant avant tout. « Mon inspiration vient de ma mère, qui est enseignante à l’école secondaire. Ma motivation première à faire des études doctorales, c’était de pouvoir enseigner à l’université et ainsi influencer de façon positive la future génération. »

Il encourage ses étudiants à ne pas se sentir dépassés par la vitesse des développements en IA. « Les technologies ont de courtes durées de vie. L’essentiel pour pouvoir rester dans la course, c’est de bien maîtriser les bases fondamentales et d’améliorer sans cesse ses compétences en programmation. »

Sa soif de transmettre et de partager les connaissances les plus récentes dans son domaine l’a conduit à organiser une conférence sur les agents d’apprentissage continu (CoLLAs, pour Conference on Lifelong Learning Agents), dont la première édition, présentée l’an dernier, fut une réussite. La seconde édition, qui aura lieu l’été prochain, devrait connaître un succès similaire. « J’ambitionne de faire de cette conférence l’événement le plus important au monde dans son domaine d’ici les cinq prochaines années », annonce-t-il. Encore une autre façon d’avoir un impact dans le monde.
 

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